Analyse des nouvelles inscriptions sur les listes électorales 2007
Publié le 28 Mars 2007
Le ministère de l'intérieur a publié les chiffres du nombre d'inscrits sur les listes électorales pour les présidentielles ainsi que leur évolution depuis l'année dernière. C'est l'occasion de vérifier l'impact des campagnes d'appel à l'inscription (celles de personnalités comme Thuram ou Djamel mais aussi celle de la section de Gentilly !).
Le nombre d'inscrits est proche de 44 millions, en hausse de 4,2%. Cette hausse est très significative mais n’est pas inédite pour une année d'élection présidentielle (mars de l'année N-1 à mars de l'année N), on enregistrait en effet précédemment +2,3% en 2002, +2,1% en 1995, +1,9% en 1988 et +3,7% en 1981.
Si on regarde les évolutions non plus sur les 12 mois précédents l’élection mais d’un scrutin à l'autre on confirme cependant la spécificité de 2007. On a en effet les croissances suivantes : 2007/2002 +6,7% ; 2002/1995 +3% ; 1995/1988 +4,7% ; 1988/1981 +4,9% ; 1981/1974 +18,9%. Ce dernier chiffre est spectaculaire mais s'explique par le passage de la majorité électorale de 21 à 18 ans pendant la période. Si on l'exclu on a bien une hausse pour cette année nettement supérieure à celles enregistrées habituellement. Cela alors même que nous sommes passés du septennat au quinquennat et surtout que les jeunes électeurs (sans doutes une grande partie des nouveaux inscrits) de 2007 appartiennent à des classes d'ages (entre 1984 et 1989) plutôt moins nombreuses que précédemment (dernières vagues de baby-boomers jusqu'à l'élection de 1988 voire 1995).
L'inscription automatique des jeunes a du jouer un rôle. Mais sans nul doute la mobilisation civique, notamment dans les banlieues également. Des villes comme Nanterre, Saint-Denis ou Clichy-sous-bois enregistrent des progressions importantes.
On comprend mieux la hausse des inscriptions quand on analyse les chiffres par département (voir la carte ci-dessous, source Les Echos).
Les taux de croissance des inscriptions (de 2006 à 2007, mais cela doit être une bonne approximation pour 2002 à 2007) sont les plus forts en région parisienne (26% des nouveaux inscrits pour 15% du total des inscrits). L’Ile-de-France, le Rhône et les Bouches-du-Rhône concentrent plus d’un tiers des nouveaux inscrits. De manière générale les départements les plus urbanisés enregistrent les plus fortes progressions.
Ces chiffres peuvent être croisés avec les données démographiques de l’INSEE. Des tableaux des populations par classe d’age de 5 ans permettent d’évaluer la population en âge de voter en 2007 (on prend les plus de 15 ans en 2004).
On peut alors expliquer près de 85% des écarts de croissance du nombre d’inscrits entre départements métropolitains.
La première variable explicative est évidemment l'accroissement démograhique.
En moyenne 10 habitants en âge de voter en plus dans un département font 4 inscrits supplémentaires.
L’autre variable déterminante est le taux de non inscrits : un taux d’inscription inférieur de 10% dans un département se traduit par une croissance des inscriptions supérieure de 1,5 points de pourcentages. Bien sûr les départements ayant fait le plein des inscrits (certains dépassent 100%, on y reviendra !) ne peuvent plus progresser que par accroissement démographique. A contrario des départements comme Paris ou la Seine Saint-Denis avec environ un tiers de non inscrits ont des réserves importantes, qui permettent à Paris d’afficher une croissance des inscrits de près de 10% malgré une très faible hausse de sa population en âge de voter (environ 1%).
Une part des nouvelles inscriptions dans les départements urbains (les villes et périphéries des grandes agglomérations) est sans doutes liée au transfert d’inscription d’habitants qui demeuraient jusqu’alors inscrits dans leur région d’origine. Les départements de l’Ouest et des Alpes ont souvent presque autant voire plus d’inscrits que d’habitants en âge de voter (Vendée, Hautes-Alpes, Landes, Alpes-de-Haute-Provence et Morbihan se distinguent particulièrement). Certains départements « périphériques » sans doutes moins attractifs ont des taux d’inscription relativement bas. On ne les citera pas mais ils se trouvent souvent dans le Nord-Est et le Centre.
Les deux facteurs explicatifs des inscriptions ne permettent évidemment pas d’expliquer la totalité des nouvelles inscriptions. Ainsi Paris (+10%) et les Hautes-Alpes (+6%) enregistrent des progressions supérieures d’environ 2 points de pourcentage aux « prévisions » du modèle. Au contraire, le modèle sur-estime d’environ 1,5 points de pourcentage la croissance des inscriptions pour le Haut-Rhin (+2%) et le Bas-Rhin (+3%) suivis de la Lozère (+1%).
Il ne semble pas y avoir de relation entre la couleur politique des départements (en considérant les résultats de 2002) et l’évolution des inscriptions. Mais évidemment les nouveaux inscrits sont une population spécifique, plus jeune et plus urbaine. Donc a priori plus favorable à la Gauche et moins favorable au FN.
Pour finir un point sur Gentilly :
Avec 1122 inscrits supplémentaires depuis 2005 (+13%) Gentilly se rapproche des 10 000 inscrits, chiffre atteint avant 1989 c'est-à-dire avant qu’un grand nettoyage des listes électorales ait eu lieu (suite à la loi Joxe de 1990 et après qu'un certain nombre d'irrégularités aient été mises en évidence à l’époque par le PS…).
Le bureau Pierre Curie (cité du 162 Gabriel Péri et zone pavillonnaire avoisinante) se distingue avec une progression de plus de 30%. Suivent des bureaux du centre ville et du Plateau (environ +20%). Le bureau Mairie salle des fêtes (quartier Frileuse pour l’essentiel) ne progresse que de 3% environ. Impossible pour le moment d’évaluer l’impact de la démographie dans ces progressions mais il ne fait pas de doutes que la progression enregistrée dépasse largement l’augmentation de la population. Bienvenue aux nouveaux électeurs !
